J'ai descendu l'escalier, un peu sonnée, mais moins triste que je ne l'aurais pensé. Mes collègues, m'avait-il dit, étaient allées l'une après l'autre, se plaindre de ma mauvaise humeur.
Toutes insistait-il, toutes étaient allées raconter les misères que je leur faisais subir, toutes.
J'ai descendu l'escalier, en bas il n'y avait plus personne, mon manteau jeté sur ma chaise et mon sac avachi sur le bureau, mais plus un souffle, seul le photocopieur allumé ronronnait doucement.
Je suis sortie, il pleuvait, la nuit était déjà depuis longtemps tombée, froide.
J'ai traversé la rue, calmement, c'est fou d'ailleurs comme j'étais calme.
Ainsi me disais-je, depuis cinq ans bientôt, je travaillais avec des inconnues. Des jeunes femmes qui me souriaient, me faisaient des grâces, riaient à mes bons mots, me remerciaient chaleureusement lorsque j'apportais une brioche... mais qui en réalité ne m'aimaient pas.
J'ai traversé la ville, sagement, pas une once de tristesse, rien, une sorte de vide bienfaisant, j'allais maintenant apprendre à me libérer, faire, mais simplement.
Demain j'arriverai à l'heure, fini le zèle. J'apprendrai à séparer ma vie en deux, là bas et ici.
L'injustice de cette situation est si énorme, que je me sens comme anesthésiée.
Il m'est tout à fait inutile de vouloir faire quoique ce soit d'autre que d'ignorer.